Accueilli en grand vainqueur sur le ponton d’honneur de la marina de Saint-François, Mathis Bourgnon ne cache pas être encore un peu abasourdi par sa victoire, dont il a réellement pris conscience en croisant Benoît Marie à 55 milles de l’arrivée. Des « mots forts », échangés à la VHF entre ces deux grands animateurs de la course, illustrent l’intensité de la bataille qu’ils se sont livrée jusque dans les ultimes longueurs de cette traversée de l’Atlantique.
Épuisé, après être allé au bout de la fatigue, le skipper suisse de 28 ans, qui a navigué « à la Bourgnon », frappe un grand coup avec cette victoire de haute lutte au terme d’une Boulangère Mini Transat 2025 épique.
« Gagner, c’est magique »
« Depuis la moitié de la course, j’ai eu peur de perdre un safran. Heureusement, j’étais bien équipé, j’avais tout ce qu’il fallait à bord pour réparer et faire en sorte que cela tienne. Mais jusqu’à la fin, je ne pouvais pas tirer sur le bateau. Pour moi, la première place et Nicomatic, c’était loin, et je savais qu’il y avait Alexandre (Demange) qui marchait fort derrière.
Gagner, c’est magique. Je suis encore un peu tremblotant. Il y a plein de trucs… Je n’ai pas dormi depuis longtemps, je n’ai fait que barrer, barrer… Je me suis mis minable. J’ai eu quelques soucis de GPS, et je n’avais pas de spi médium. Je suis vraiment allé dans mes retranchements, avec beaucoup de stress : le stress de naviguer tout le temps sous spi max, les craquements du safran que je craignais de casser. Le manque de sommeil, c’était le plus dur : j’ai vraiment tiré. »
Rencontre avec une baleine
« J’ai même croisé une baleine ! J’ai pris un coup de queue sur tribord. J’étais en train de manger tranquillement à l’arrière quand j’ai entendu un énorme bruit, et j’ai vu surgir un dos immense, large comme le bateau. J’ai tremblé pendant deux minutes… »
« Vive la Suisse, et vive l’Atlantique ! »
« J’ai beaucoup pensé à la victoire de mon père, qui a gagné quand je n’étais pas encore né. J’avais conscience de faire une très belle course, même en terminant deuxième. Quand j’ai entendu à la vacation que j’étais devant Alex et Julien (Letissier), qui naviguent tous les deux sur des super bateaux, c’était incroyable. Et cette nuit, quand j’ai croisé Benoît, on a parlé à la VHF : on a eu des mots forts. On était à 55 milles de l’arrivée. Il m’a dit que c’était fini pour lui, qu’il avait beaucoup de dégâts à bord. Il y a beaucoup de respect entre nous. On a beaucoup travaillé la météo ensemble.
Quand je pars, je me dis toujours que je veux gagner, et je fais tout pour y arriver. J’avoue que c’est un peu insolent (rires). J’ai un bateau de 2017, ce n’est pas le plus récent, mais il fonctionne super bien. Papa m’a beaucoup aidé à bien le préparer. C’est aussi ce qui est beau dans cette histoire : on a préparé le bateau ensemble, dans le jardin familial, à l’ancienne. Petite équipe, petit budget… Il m’a donné beaucoup de conseils et m’a formé sur la météo. C’est magique que ce projet soit gagnant ! Vive la Suisse, et vive l’Atlantique ! »





