Après l’arrêt en mer, paroles de solitaires

La première étape de La Boulangère Mini Transat 2025 a été interrompue en raison d’un ouragan menaçant les côtes portugaises. Face à cet événement exceptionnel, les 90 solitaires ont dû stopper leur course et rejoindre différents ports d’abri. Depuis Cascais, Peniche ou Palma, ils livrent leurs impressions : entre frustration, soulagement et enseignements tirés de cette expérience hors norme, chacun revient sur ce coup d’arrêt inattendu.

Quentin Mocudet (986 – Saveurs et Délices), à Cascais :

« Cela laisse un sentiment un peu bizarre de recevoir ce message, mais il n’y avait pas le choix. Je suis content de mon début de course : c’était rythmé, dense. J’ai eu quelques problèmes techniques, j’ai dû monter dans le mât, je me suis donné. Je suis forcément un peu déçu car on avait creusé un petit trou. Il va falloir tout recommencer. On fait un sport où l’on joue avec la météo, c’est ce qui fait que la voile n’est pas un sport comme un autre. »

Paul Cousin (981 – AFP Groupe Biocombustobles),  à Cascais :

« Ça fait trois ans qu’on prépare cette Transat et c’est dur quand ça s’arrête. J’ai eu un gros coup de mou après l’annulation, j’étais au fond du trou pendant une journée. Mais c’est la vie, il faut rebondir. Je pense que le convoyage va me permettre de passer à autre chose. J’ai un peu de mal à faire le deuil de cette première étape. J’étais deuxième au moment de l’annulation, mais j’étais mal positionné. Il faut tirer les leçons de cette première étape et, après ce qu’on vient de vivre, tout va nous paraître normal maintenant ! »

Pierre-Adrien Morinaux (551 – Fondation Louis),  à Peniche :

« J’ai toujours rêvé de nous arrêter ici et nous y voici. Ville de pêcheurs, ville qui a une porte sur l’océan. On est sur le plateau continental, il y a des dauphins partout, des poissons partout. (…) Je commençais à être bien en mer. J’étais content d’être en bateau, tout seul. Tu commences à prendre le rythme et tu dois t’arrêter… mais ce sont les lois de dame nature. Elle est féroce et nous oblige à nous arrêter aujourd’hui. »

Naho Takahara (998 – Seven X Seven), à Peniche :

« C’est un peu surprenant car nous ne pensions pas que cela pouvait être annulé comme ça. Avant le départ, nous avions parlé de ce système de basse pression mais c’était très loin et, finalement, il est juste là. C’est énorme. Ça a l’air très dangereux, avec des vagues de 6 à 8 mètres… ouahou ! Je suis très heureuse d’être à l’abri. Tout le monde est en sécurité. »

Thiemo Huuk (1003 – Europe), à Cascais :

« C’est beaucoup mieux d’être en sécurité ici que d’être au large. J’ai adoré les deux-trois premiers jours de course. J’étais un peu triste que ça s’arrête. J’aurais adoré continuer mais avec des vagues de 7 à 8 mètres, ça n’est pas marrant. »

Antoine Canivet (985 – Ela Met tes baskets), à Cascais :

« J’ai de la chance d’avoir une famille qui me fait confiance. Juste avant le départ, ma mère m’a dit : “Quoi que tu fasses, on sera super fiers de toi.” Merci d’avoir réagi tôt et merci de l’accueil. On récupère les téléphones, on arrive, il y a un remorqueur. Tout ça, c’est cool. »

Benoît Marie (1067 – Nicomatic Petit Bateau), à Palma :

« C’est un peu frustrant mais je suis resté dans mon mode course. J’avais plein de choses à apprendre et je reviens avec un carnet rempli d’enseignements. Je suis vraiment content de ça. J’arrive en tête donc c’est toujours agréable, même si ça ne sert à rien car le compteur n’est pas ouvert sur le temps… mais ce n’est pas grave. Le match de la seconde étape n’en sera que plus beau. Ce bateau est un tapis volant. Plus j’en fais, plus je l’aime. Il est incroyable. »

Louis Hulet (630 – James Caird) :

« J’étais  sur une option ouest qui me semblait intéressante météorologiquement. J’étais dans la pétole quand j’ai reçu le message de l’annulation de l’étape. Mais c’est vrai que cet avertissement qui parle d’un ouragan, cela fait tout de suite penser qu’on n’a pas envie d’être là ! J’ai eu un retour un peu stressant. Dans le briefing météo, avant course, on avait eu connaissance deux scénarios possibles : que la dépression suive sa route nord-est, qu’elle continue gentiment, ou qu’elle vienne mourir au nord de la dorsale. Il n’y avait pas trop de raisons de s’inquiéter. C’était finalement un phénomène surprise. Je ne me suis vraiment pas senti au bon endroit, et pas très à l’aise, avec la peur d’essuyer un truc que je ne connais pas. 

J’ai donc commencé à réfléchir aux équipements de sécurité, aux panneaux solaires pour qu’ils ne s’envolent pas.  J’avais sorti le tourmentin et je savais où se trouvaient la TPS  (combinaison) et le matériel de survie. Je ne faisais plus la course contre les copains, mais la course contre un ouragan ! 

Quand je suis arrivé, la pression est retombée. Il n’y avait plus d’épée de Damoclès, et j’étais soulagé. »

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